mercredi 21 novembre 2012

HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE


L’HPI fait partie de ces maladies rares mais qui sont faciles à reconnaître une fois qu’on en a vu un cas ou lu la description. Elle se définit par des hémorragies à l’intérieur des alvéoles pulmonaires, qui laissent derrière elles des dépôts d’hémosidérine nocifs pour les tissus pulmonaires ; hémorragies localisées aux poumons et - fait très particulier et qui constitue tout le problème de cette maladie hémorragies survenues en l’absence de toute altération cardio-vasculaire décelable, contrairement à l’H.P. secondaire, d’observation banale chez les mitraux, par exemple.

Maladie rare (il en existe environ 60 observations dans la littérature) mais qu’il faut connaître en raison du pronostic qui s’y attache et dont la pathogénie encore pleine d’obscurités - conduit à envisager l’anatomie, la physiologie et la pathologie d’un secteur fonctionnel particulièrement important : te lit vasculaire pulmonaire.

CLINIQUE DE HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE



circonstances d’apparition de 1’HPI restent très imprécises : un fait, pourtant est probablement significatif :

L’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE est essentiellement une maladie de l’enfance observée principalement entre 2 et 10 ans. Elle est exceptionnelle à l’âge adulte ce qui souligne déjà la gravité de cette maladie qui permet rarement aux enfants qui en sont atteints d’atteindre l’âge d’homme.
Pour le reste : rien à signaler relativement au sexe, à la répartition géographique ni au caractère familial qui paraît manquer.

Le mode de début mérite qu’on s’y attarde un instant. Comme dans un certain nombre de pneumopathies chroniques de l’enfant la Mucoviscidose à forme pulmonaire, par exemple, ou comme dans une autre pneumopathie également mystérieuse : la fibrose pulmonaire d’HAMAN-RICH, beaucoup d’observations signalent une “coqueluche “ au début de l’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE. L’enfant tousse comme un coquelucheux jusqu’à ce qu’il devienne évident qu’il est atteint d’une pneumopathie durable. S’agit-il d’une coqueluche véritable, compliquée secondairement d’HP ? ou d’une pseudo coqueluche ? La réponse ne pourrait venir que d’investigations bactériologiques systématiques. Retenons toutefois qu’il faut se méfier du diagnostic de coqueluche en général, et surtout quand cette coqueluche supposée se prolonge. Toujours est-il qu’à partir d’un certain temps, variable selon la forme envisagée, la maladie, constituée, va évoluer en 2 phases bien tranchées :

1- Seule la première phase évolutive est caractéristique. Elle est signée par des poussées qui associent des troubles respiratoires à une anémie. Le début des poussées est habituellement brusque. Les troubles respiratoires sont en soi assez banaux : dypsnée, polypnée, tirage, toux plus ou moins quinteuse, cyanose plus ou moins marquée. Il est exceptionnel, chez l’enfant, de noter l’émission de crachats hémoptysiques ou des vomissements de sang d’origine pulmonaire secondairement dégluti. Mais, à défaut de signes d’extériorisation aussi explicites, l’existence d’hémorragies dans les alvéoles pulmonaires se trahit par l’association à la dyspnée d’une anémie tout à fait insolite en pathologie respiratoire.

Le diagnostic est presque fait si, frappé par la pâleur de l’enfant on demande un hémogramme qui révèle une anémie avec chute des globules rouges à 3 millions, 2 millions, i million selon les cas. Caractère capital, c’est une anémie hypochrome avec forte réduction du taux de l’hémoglobine 5000 et parfois jusqu’à 20 et même 50% Ce syndrome de pneumopathie dyspnéisante et anémiante qui caractérise la poussée d’HP s’accompagne d’une altération notable de l’état général avec fatigue marquée et fièvre d’une importance variable.
La durée de la poussée s’étend de quelques jours à quelques semaines selon l’importance des hémorragies alvéolaires. Puis c’est une période de rémission. Rémission de qualité variable: parfois complète, compatible avec la reprise d’une activité normale ; d’autres fois relative avec persistance de dyspnée et de toux à l’effort et fatigabilité anormale. Rémission de durée variable : parfois courte, quelques semaines ou quelques mois, d’autres fois prolongée pendant à 6 ans.

C’est précisément la fréquence des poussées qui va conditionner l’évolution générale de la maladie.

1) Des poussées subintrantes réalisent parfois une forme aigu qui entraîne la mort en quelques semaines après le début apparent.

2) Des poussées rapprochées conditionnent des formes subaigus fatales en i an environ.

3) Des poussées espacées caractérisent la forme prolongée (la plus fréquente) de la maladie.
Mais, - et c’est le deuxième stade évolutif annoncé au début - quand elle se prolonge, la maladie change d’aspect. Les poussées dyspnéisantes et anémiantes deviennent moins évidentes, le tableau clinique se banalise et devient celui d’une insuffisance respiratoire chronique :

hypotrophie pondéro-staturale ;

déformation thoracique ;

hippocratisme digital ;

dyspnée plus ou moins continue qui réduit de plus en plus l’activité physique de l’enfant.
Fait nouveau à la pâleur initiale, succède peu à peu une érythrocyanose du visage et des extrémités. A la déglobulisation initiale succède peu à peu une polyglobulie secondaire.

Les signes cardiaques qui manquaient à la première phase de la maladie apparaissent peu à peu sous les manifestations du “ cœur pulmonaire “ : encombrement permanent des bases, élargissement de la silhouette cardiaque, surtout aux dépens des cavités droites hépatomégalie avec reflux hépato-jugulaire.

La mort - terminaison habituelle de cette maladie grave - est généralement le fait d’une insuffisance cardiaque au terme d’une évolution de plusieurs années une vingtaine d’année dans certaines observations.

La (Image 1) résume l’évolution clinique d’une HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE observée dans le service et suivie depuis 8 ans.

ANATOMIE PATOLOGIQUE

Les lésions de l’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE ont été connues avant les signes cliniques de la maladie. Ces lésions s’inscrivent sous le signe de la surcharge pulmonaire en hémosidérine. Surcharge dont l’importance se traduit quantitativement par les résultats des dosages de fer dans le tissu
pulmonaire, pratiqués dans 4 cas : normalement, le tissu pulmonaire ne contient que quelques mgrà 20 cgrde fer pour 100; dans l’HP, le taux du fer pulmonaire peut atteindre io gr. pour 100.


Cette surcharge ferrique conditionne l’aspect macroscopique qui permet déjà le diagnostic, grâce à la couleur brune rouillée des deux poumons qui sont augmentés de consistance. C’est “ l’induration  brune essentielle “ des auteurs anglais qui, sur les tranches de section, s’étend à la plus grande partie du parenchyme pulmonaire.
Les bronches sont macroscopiquement normales. Par contre, les ganglions péribronchiques sont plus ou moins augmentés de volume et de couleur brunâtre.



HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE
image 1



Fait important : l’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE diffère de l’HP des cardiaques par l’absence de lésions cardio-vasculaires notables : pas de lésions cardiaques, en dehors d’une hypertrophie modérée du ventricule droit ; pas d’anomalies vasculaires après dissection ou injection colorée des vaisseaux du poumon.

L’HISTOLOGIE met en évidence la surcharge ferrique et ses conséquences sur les éléments du tissu pulmonaire. Dans les alvéoles des hématies, des macrophages chargés d’hémosidérine qui prend électivement les colorants du fer et des grains d’hémosidérine libre. Les cloisons inter alvéolaires sont épaissies; les cellules de revêtement et le tissu interstitiel sont bourrés de grains d’hémosidérine et l’hyperplasie du réticulum et du conjonctif peuvent évoluer vers la sclérose avec parfois infiltration de cellules rondes. Les capillaires alvéolaires sont tortueux et dilatés. Les artères et les veines de petit calibre, dont les parois sont parfois le siège d’une surcharge pigmentaire, peuvent être épaissis et subir la dégénérescence hyaline. Les petites bronches sont également infiltrées de pigment. Les fibres élastiques des cloisons alvéolaires et des parois artérielles ont été particulièrement étudiées : dans les formes anciennes elles sont amincies et fragmentées, puis phagocytées par des cellules géantes
multinucléées; ces lésions manquent dans les formes aigus, rapidement mortelles.

En résumé, des lésions exclusivement pulmonaires avec

1- des dépôts d’hémosidérine dans les alévoles, les cloisons alvéolaires et les parois des petits vaisseaux et des petites bronches
2- une hyperpiasie conjonctive sans doute réactionnelle
3 - des altérations des fibres élastiques réservées aux formes prolongées de la maladie.

Tels sont les caractères anatomo-cliniques de cette curieuse maladie qui se résume à des poussées hémorragiques intra alvéolaires avec leurs conséquences sur le tissu pulmonaire puis sur le coeur droit.





EXAMENS COMPLÉMENTAIRES DE HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE


Les éléments du diagnostic positif sont fournis par
- la radiologie pulmonaire
- l’hématologie
- et la constatation des sidérocytes.
1- LES RADIOGRAPHIES PULMONAIRES révèlent l’existence d’opa-
cités non homogènes au sein desquelles on distingue des nodules
inégaux, disséminés, irréguliers, à contours flous (image 2 et 3). Ces opacités se caractérisent par
a) leur topographie bilatérales, elles prédominent aux hiles et diffusent à partir des hiles en ailes de papillon mais respectent les sommets et les sinus costo-diaphragmatiques.

b) leur évolution : elles persistent dans l’intervalle des poussées mais augmentent d’importance et d’étendue à chaque poussée.

Si l’on ne disposait que des clichés pulmonaires, ces aspects pourraient évoquer :
- une tuberculose miliaire, mais la cuti et l’intradermo réactions sont
négatives
- une histoplasmose, une blastomycose ou une coccidioidomycose mais les intradermos aux antigènes correspondants sont négatives

- la maladie de Besnier-Boeck--Sc/’iaumann mais il n’y a pas d’autres localisations de cette maladie dont les manifestations pulmonaires sont latentes et surtout faites d’adénopathies médiastinales ;

- la forme pulmonaire d’une hémopathie maligne, leucose en particulier, mais l’hémogramme donne des renseignements bien différents.

2- L’HÉMOGRAMME pratiqué à l’occasion des poussées a une grande valeur diagnostique. Nous l’avons dit, l’association à la dyspnée d’une anémie entre 3 et 1 million, anémie hypochrome avec diminution du taux de l’hémoglobine, parfois jusqu’à 200 et au dessous est tout à fait caractéristique.

Opacité hilaire bilatéral
image 2





Mais, tandis que la déglobulisation se répare entre les poussées, avec réticulocytose sanguine, l’hypochromie persiste entre les poussées : le taux du Fer Sérique est très abaissé : 63 microgrammes pour 100cc de sang dans notre observation, à 10 microgrammes pour 100 dans certains cas.
En dehors de cela, rien de constant, si l’on excepte une augmentation plus ou moins marquée de la bilirubinémie indirecte (plus de 10 mg%) avec urobilinurie qui sont les témoins de l’hémolyse secondaire aux hémorragies intra alvéolaires.


Mais pour le reste, tout est habituellement négatif
- Résistance osmotique des hématies normale
- Chiffre des plaquettes normal (sauf dans un cas de CASTROFREIRE);
- Pas d’hémoglobine anormale
- Examen immuno-hématologique normal à l’exception de deux observations : l’une avec réaction de Coombs légèrement positive (1/64), l’autre avec réaction des agglutinines froides, positive au 10.000.000.


Opacité non homogéne
image 3




En fait, les modifications hématologiques sont celles d’une anémie par spoliation sanguine, en rapport avec les hémorragies intra alvéolaires.

3- Hémorragies dont le témoin direct est constitué par la mise en évidence des sidérocytes, troisième élément du diagnostic d’hémosidérose pulmonaire. Les sidérocytes, classiques “ cellules cardiaques” sont des macrophages chargés de pigments ferriques provenant des alvéoles pulmonaires à la suite d’une poussée d’hémolyse locale.


Comment peut-on les prélever ? :
- rarement dans l’expectoration chez l’enfant ;
- habituellement par lavage d’estomac ce qui fut suffisant dans notre observation ;
- d’autres auteurs préconisent la bronchoscopie et même la ponction pulmonaire.

On identifie les pigments ferriques grâce à leur intense affinité pour le bleu de Prusse, à la coloration de Tiermann et Schmelzer, après réduction par le sulfure d’ammonium. Sur les lames, les granules ferreux d’hémosidérine se présentent sous deux aspects selon que de grosses granulations bourrent les macrophages, ou que, les cellules macrophages ayant éclaté, on distingue seulement des granules ferreux à l’état libre.

DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL

Tels sont les éléments du diagnostic positif mais dans un deuxième temps, il faut - pour parler d’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE - éliminer par un examen cardio-vasculaire comolet, clinique radiologique, électro-cardiographique et, au besoin, par cathétérisme cardiaque, les hémosidéroses pulmonaires
secondaires aux cardiopathies : hémosidéroses de cause connue et beaucoup plus banales.

Au vrai, les ressemblances entre HP secondaire et HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE sont surtout anatomiques, les HP des cardiaques surviennent dans un contexte clinique différent et n’ont pas cette évolution paroxystique dyspnéisante et, surtout, anémiante, qui caractérise le premier stade évolutif
de l’HP idiopathique.

On sait que les hémosidéroses pulmonaires secondaires compliquent une hypertension pulmonaire plus ou moins permanente, qui peut elle-même être secondaire ou, plus rarement, primitive.

On connaît bien l’hypertension pulmonaire secondaire au rétrécis sèment mitral avec stase dans l’oreillette gauche qui s’hypertrophie et hypertension rétrograde de la petite circulation.

D’autres fois, l’hypertension pulmonaire est la conséquence d’une  cardiopathie congénitale avec shunt entre circulation droite et circulation gauche. C’est le cas

- du canal artériel large
- de la communication inter ventriculaire large avec ou sans complexe d’EISENMENGER
 et, plus rarement, de la communication inter auriculaire large.


Initialement, le shunt se fait de la gauche vers la droite et provoque une surcharge du lit vasculaire pulmonaire, d’où l’augmentation de la résistance pulmonaire avec hypertension pulmonaire secondaire. Quand la pression pulmonaire excède la pression systémique, le sens de shunt s’inverse et se fait de la droite vers la gauche cependant qu’apparaît la cyanose.
Ces différentes cardiopathies possèdent un certain nombre de signes caractéristiques sur lesquels je ne peux insister ici.

Plus délicat peut être le diagnostic de l’hypertension pulmonaire primitive sans cardiopathie mitrale ni shunt décelable dont il existe une quarantaine de cas publiés chez le jeune enfant.
Il semble qu’elle s’accompagne d’insuffisance cardiaque précoce, avec hépatomégalie et que manquent les poussées dyspnéisantes et améniantes de l’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE. Les signes physiques en sont une dilatation de l’artère pulmonaire à la radio, une surcharge ventriculaire droite importante à l’électrocardiogramme et surtout une hypertension pulmonaire notable (30 mm de Hg et plus) au cathétérisme cardiaque.

Anatomiquement, des lésions athéromateuses de l’artère pulmonaires rétrécissent la lumière vasculaire.
Tout ceci manque dans l’Hémosidérose pulmonaire idiopathique, du moins pendant toute un partie de son évolution.
Cette discussion a été faite chez notre malade que nous n’avons pas manqué de montrer à des cardiologues compétents. Les seules manifestations cardiaques, très discrètes, étaient dans notre cas un léger débord des cavités droites, mais sans modification de l’électrocardiogramme ; surtout, le cathétérisme cardiaque a confirmé l’absence de shunt et l’absence d’hypertension pulmonaire permanente.
La seule modification était constituée, dans le ventricule droit, par des variations de la pression diastolique au cours de la respiration.
Bref, chez cet enfant, aucune des cardiopathies actuellement connues n’apportait l’explication de l’hémosidérose pulmonaire constatée.

PATHOGÉNIE

Ainsi se trouve posé le problème pathogénique de l’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE: des hémorragies intra-alvéolaires paroxystiques, sans cardiopathie au sens habituel du terme.

Ici commencent les hypothèses :

1- La plus ancienne est celle de GLANZMANN qui attribue les hémorragies à la stase sanguine consécutive à un défaut d’élasticité pulmonaire dû à des altérations primitives, congénitales, de la charpente élastique du poumon, réalisant une sorte de cirrhose pulmonaire.
Mais cette hypothèse ne s’accorde pas avec l’intégrité des fibres élastiques dans les formes aigus, rapidement mortelles : les lésions des fibres élastiques semblent ainsi secondaires aux dépôts d’hémosidérine.

2 - L’hypothèse de poussées d’hypersplénisme, avec diminution de la perméabilité des capillaires pulmonaires a été suggérée par CASTRO FREIRE.
Cet auteur s’appuie sur deux observations d’HP associées à un hypersplénisme et améliorées par spiénectomie.
Mais cet hypersplénisme, s’il est probable dans un cas (splénomégalie avec thrombopénie et leucopénie), est discutable dans la seconde observation. D’autre part, d’assez nombreuses spiénectomiespratiquées par la suite par différents auteurs, n’ont pas donné de résultats appréciables.
Il reste enfin qu’il faudrait expliquer la localisation strictement pulmonaire de cette fragilité capillaire.
3-  Une autre hypothèse : celle d’une maladie immuno-allerqique à détermination pulmonaire repose sur des constatations fragmentaires : réaction de COOMBS positive dans un cas, agglutinines froides positives dans un autre. Elle s’appuie également, de manière très indirecte, sur les résultats du traitement par l’ACTH ou par la cortisone dans l’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE.
Mais ces résultats thérapeutiques appellent deux remarques

1- c’est, d’une part, le caractère incomplet de l’amélioration obtenue (par exemple, dans notre observation qui ressemble en cela aux autres cas publiés, on enregistre une amélioration notable de la dyspnée paroxystique, mais la persistance des images radiologiques).

2- il est, d’autre part, impossible de fonder une pathogénie sur les résultats obtenus avec la cortisone, dans l’ignorance où l’on est du mode d’action de celle-ci dans chaque cas particulier.

Les hypothèses précédentes n’expliquent pas les particularités de la maladie sur lesquelles il n’est pas inutile de revenir
- le début de la maladie dans l’enfance,
- la localisation strictement pulmonaire,
- l’évolution par poussées des hémorragies intra alvéolaires,
- et, d’autre part, le fait que l’hémosidérine libérée par destruction de l’hémoglobine, s’accumule dans le tissu pulmonaire au lieu d’être remise en circulation.

A notre avis, toute ces particularités s’expliquent mieux dans l’hypothèse d’un trouble circulatoire à l’échelon “ lit vasculaire pulmonaire “, avec perturbations de l’hémodynamique dans les capillaires et les petits vaisseaux du poumon - les gros vaisseaux du poumon étant, on le sait, indemnes.

Il pourrait s’agir de poussées d’hypertension pulmonaire paroxystique, dues peut-être à un spasme dont la production serait favorisée, dans certaines conditions, par une anomalie congénitale des petits vaisseaux.

Par analogie avec le mécanisme assigné à l’hémosidérose des mitraux par LENDRUN et par LAUBRY et LENEGRE, on est tenté de supposer que l’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE est également due à des perturbations circulatoires plus ou moins localisées, au système anastomotique très particulier qui relie les artères bronchiques - nées de l’aorte -aux artères et aux veines pulmonaires.
Mais disons de suite que la signification de ces artères anastomotiques ou segments d’arrêt est très discutée. Pour certains auteurs, elles ne se développent que secondairement, dans des poumons qui ont déjà subi des altérations pathologiques. Pour d’autres, elles existeraient dans le poumon normal et auraient un rôle physiologique très important : par leur ouverture intermittente, elles permettraient la mise au repos fonctionnel de territoires alvéolaires auxquels elles fourniraient l’apport en oxygène nécessaire, en l’absence de ventilation pulmonaire.

S’il en était ainsi on comprendrait assez bien qu’une voie de fonctionnement de ces anastomoses entre grande circulation et circulation pulmonaire, ait son point d’impact au niveau du lit vasculaire pulmonaire.
Malheureusement, il faut bien reconnaître qu’aucune description histologique ne mentionne l’état de ces segments d’arrêt dans l’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE. Or ces formations seraient facilement reconnaissables en raison de l’épaisse couche musculaire longitudinale qui les caractérise.
Faut-il supposer que ces formations ont échappé, jusqu’à présent, à l’attention des histologistes ? ou bien que HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE est précisément due à l’absence congénitale, à l’agénésie des segments d’arrêt ? questionsauxquelles des recherches histologiques désormais méthodiques pourront seules répondre.

Il ne demeure pas moins que les circonstances d’apparition et l’aspect de l’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE suggèrent fortement l’existence d’un trouble circulatoire d’origine congénitale dans le domaine des petits vaisseaux du poumon : il s’agirait en d’autres termes d’une variété de vasculopathie congénitale à l’échelon du lit vasculaire pulmonaire, responsable des hémorragies alvéolaires et de l’accumulation d’hémosidérine avec ses conséquences sur le tissu pulmonaire.



TRAITEMENT DE HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE 


S’il en était ainsi on comprendrait bien que nous ne disposions jusqu’à présent que d’un traitement symptômatique dont les agents essentiels sont d’une part l’oxygénothérapie et la digitaline contre l’insuffisance respiratoire et cardiaque et, d’autre part, les transfusions sanguines et la médication martiale contre l’anémie.

Et c’est sans doute parmi les médications symptômatiques qu’il faut ranger la corticothérapie de l’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE : traitement dont les résultats sont inconstants si l’on s’en réfère à la littérature ou, en tous cas, incomplets, comme dans notre observation et celles d’autres auteurs où l’on a l’impression de procurer aux malades un certain bien-être, peut-être une atténuation de la dyspnée et une survie plus prolongée mais sans enrayer vraiment l’évolution de la maladie, à en juger par la persistance des images radiologiques.

Devant cette impuissance thérapeutique, le pronostic de l’HÉMOSIDÉROSE PULMONAIRE IDIOPATHIQUE reste particulièrement redoutable, qu’il s’agisse d’une forme aigu, rapidement mortelle ou d’une forme prolongée, aboutissant en quelques années à une insuffisance respiratoire et cardiaque intriguées.